à propos de Phantom of paradise, Brian de Palma, 1974

« Et dans ta voix
J'entends parfois
Un peu sa voix »
xxx
Magnolias for ever
Claude François

La mondialisation entraîne une déflagration des structures esthétiques (musicale, cinématographique...) ayant des répercussions sur les sujets du film post-soixante-huitard Phantom of the Paradise de Brian De Palma. Le destin de Winslow est celui d'un Faust aux allures pop qui face à l'impossibilité de faire entendre sa musique s'attache à un Label « Death records » actant littéralement le décès de ce dernier. Loin de résumer ce film à une simple critique de la puissance machinique qui tend à broyer le genius des plus humbles en générant massivement de l'écoute, il expose les mécanismes d'une structure diaboliquement efficace pour donner l’illusion du choix par la répétition du même. Pour s'en convaincre, la scène édifiante où le producteur Swan est positionné au centre d’une audition virtuelle dans laquelle se répète inlassablement la même cantate avec quelques différences stylistiques (groupe Rock, A cappella...).

Disjoncter la voix du texte, supprimer ou se réarranger de l’interprète en le dépouillant de son écriture, enregistrer en jouvence l'éternel mélodie sans altération temporelle : voici lesnouvelles données d'un succès détenu par le système des voyants rouges du quantitatif.

Nous en sommes les produits et les consommateurs - et à en croire la publicité de You tube entre deux chansons « Si vous voulez continuer d'écouter de l'ASMR, souscrivez à un abonnement payant, le You tube premium » – La gratuité d'internet qui se gratifie de la revente de nos données tend à doubler les bénéfices en nous poussant perversement à l'achat !

La musique saigne de sa disparition au profit des évolutions techniques du rush aux arrangements. Elle n'expérimente plus, elle s'arrange devant la glace face au public qui la fait advenir, les yeux clos sur ce qu'elle dit de soi et de sa génération. Elle porte la marque spectrale de la dominante sainte-électronique dans la voix même de Winslow devenue un fantôme depuis la signature du contrat avec la production. Contracter un tel pacte, c'est avoir sa place dans les limbes du Paradise ! L'exhalation pestilentielle est présente dans les pilules chimiques altérant la conscience des choses que l'on fournit à Winslow comme l'opium à Baudelaire ! À la fin comme chez Goethe, c'est l'amour fait femme qui comprend la supercherie : Das Ewig-Weibliche zieht uns hinan !